La question du règlement des différents a toujours divisé les sociétés en trois groupes. D'abord, pour la majeure partie de la population, la question des différents n'existe pas, parce que la plupart des gens ont intégré les codes qui mettent à l'abri de possibles conflits. Ces codes incluent la fuite devant les responsabilités, la délégation au groupe, la soumission face au plus fort, et l'effacement social. En général, ces gens fuient les rapports humains contraignants, de même qu'ils essaient d'éviter toutes les possibilités de conflit, et ce de toutes leurs forces.
Puis l'on trouve une minorité belligérante, faite des exclus, volontaires ou involontaires. Les exclus volontaires contrôlent le jeu social, font et défont les règles, imposent souvent leurs vues à l'ensemble. L'exclusion de ceux-ci se révèle être le résultat de choix individuels, une auto-exclusion de fait, d'où l'élément volontaire de leur condition. Pourquoi certains individus décident-ils de s'exclure volontairement de la société majoritaire? Parce qu'ils ne peuvent subir la dictature de cette majorité, et de ce fait, se définissent en opposition à celle-ci, quoiqu'ils s'efforcent de toujours évoluer à l'intérieur du cadre social, qu'ils modèlent et contrôlent. Les exclus volontaires forment donc l'élite sociale, parce qu'ils montrent la voie et s'emploient à cultiver le dépassement en tout. Les exclus volontaires sont nécessaires à toute société, tant ils en représentent le moteur.
Les exclus involontaires sont quant à eux les nécessaires perdants du jeu social, celui animant la majorité et les exclus volontaires. Ce sont les personnes sacrifiées par la majorité, parfois sous la pression des exclus volontaires, pour le bénéfice de la paix sociale.
Plusieurs pays se sont dotés d'une charte des droits humains, laquelle a le potentiel de s'imposer à tous les aspects légaux d'un pays, par le biais de jugements d'une Cours suprême. Les droits humains sont des notions fortes, inspirées de luttes sociales ou révolutionnaires passées. Mettre en opposition, puis arbitrer les notions de droit humain liées à des individus, ou des groupes d'individus, peut s'avérer ardu. La difficulté principale réside dans le fait que les droits humains sont des concepts poreux qui se chevauchent et résistent mal à l'arbitrage. Certains droits empiètent toujours sur quelques autres, lesquels bafouent toujours quelques autres droits. De fait, l'arbitrage entre les droits humains de parties opposées fait toujours des gagnants et des perdants, perpétuant l'idéologie binaire des bons et des méchants. En choisissant de se limiter à déclarer des gagnants et des perdants, le système légal basé sur les droits humains ne sert qu'à renforcer une logique d'exclusion.
Parce que la résolution des différents par l'arbitrage devrait se baser sur une notion inclusive et unique à toutes les parties, il nous apparaît tout naturel de considérer les mérites de la notion d'équité. D'abord, ce qui est équitable l'est pour tous, sans exception. La recherche de la résolution de différents basée sur l'équité a ceci de particulier que si elle ne vise pas à déclarer un vainqueur, elle s'emploie plutôt à chercher une sortie de conflit basée sur les capacités et les responsabilités de chacun, sans complaisance aucune. Parce que ce qui est équitable pour un l'est pour tous. Le remplacement de la notion de droit par celle d'équité correspond à une évolution sociale pour toute société. Les sociétés évoluées devraient être équitables.